Bercée par les clapotis d’une fontaine, je peins une des nombreuses cours ombragées du palais de Viana, à Cordoue. Un homme passe et me souffle à l’oreille : C’est beaucoup plus beau dans le patio d’à côté. De quoi je me mêle !
Celui ou celle qui peint en plein air devient un petit évènement public. Les passants apprécient observer la peinture prendre forme et partager leur avis. Un jour, alors que j’étais concentrée sur l’aquarelle d’un temple grec, j’entends un jeune homme interpeller une personne qui regardait mon carnet : Ça vaut le coup de venir voir ?
Le trottoir d’une ville animée est l’endroit parfait pour confronter son égo au jugement des autres. À l’inverse d’une exposition mûrement réfléchie, le carnet dévoile le travail en cours. Impossible dans ces conditions de sélectionner ses plus belles oeuvres pour se mettre en valeur.
Accepter de montrer l’inachevé n’a pas toujours été simple pour moi. Dessiner en extérieur s’est révélé être un réel apprentissage. L’habitude d’être observée en action a eu une conséquence sur mon approche du dessin et sur ma vie professionnelle. Cela m’a permis de pouvoir filmer mon geste et de dessiner devant un public en maîtrisant le trac du direct.
Les curieux qui sont venus me perturber m'ont finalement bien aidée. Merci pour la gêne occasionnée.