La lumière s’éteint dans la petite salle de spectacle. Quelques notes de guitares accompagnent le chant plaintif qui s’élève sous la voûte. Le claquement des talons va bientôt faire trembler la scène.
Nombreux sont ceux qui ne comprennent pas comment il est possible de représenter un modèle en mouvement. On imagine que le dessinateur a une mémoire visuelle si précise qu’il peut figer une image dans son esprit et s’en servir de modèle. Je suis bien incapable de cette prouesse.
Nous reproduisons sans cesse les même gestes et les mêmes expressions. Elles sont inscrites dans nos corps. Il suffit donc d’observer et de patienter. Quand une personne bouge alors que j’ai commencé à la dessiner, je lève le feutre et j’attends. Quand elle reprend une posture similaire, je continue. Parfois je commence plusieurs esquisses en parallèle sur la même planche et je passe de l’une à l’autre en fonction de l’éventail d’attitudes du modèle.
Un professeur m’avait dit : Pour bien dessiner, il faut passer 70% de son temps à regarder son modèle, et 30% à regarder sa feuille . C’est un des meilleurs conseils qu’il m’ait été donné d’entendre.